Le livre. Il a servi quatre présidents et évolué pendant quarante ans au cœur du pouvoir. Ancien ministre de Nicolas Sarkozy, ami intime de François Hollande, mentor d’Emmanuel Macron, Jean-Pierre Jouyet, 66 ans, a vidé ses carnets, noircis tout au long d’une carrière politico-administrative au plus haut niveau, pour écrire ses Mémoires, L’Envers du décor.
Ce fils de notaire normand, ayant cumulé les plus beaux postes de la République – du Trésor à l’ambassade de France à Londres en passant par la Caisse des dépôts –, se décrit « en contraire de Machiavel », doté d’une « spontanéité, parfois excessive », et d’une « indécrottable candeur ». L’ancien secrétaire général de l’Elysée (2014-2017) a en effet toujours eu la réputation de dire, parfois sans filtre, ce qu’il pensait, loin de l’habituelle langue de bois technocratique. Il ne se censure pas davantage ici.
C’est avec Emmanuel Macron, son « ancien protégé », qu’il se montre le plus sévère. Avec une amertume, teintée de tristesse, Jean-Pierre Jouyet conte un amour déçu : il a accompagné « Emmanuel » vers les sommets, en le présentant à François Hollande avant 2012, puis en appuyant sa nomination à Bercy en 2014, avant de se faire snober par le jeune président, un « séducteur indifférent » qui n’a soudain plus jugé utile de répondre à ses SMS. « Je suis passé en l’espace de 24 heures du statut de mentor à celui d’infréquentable (…) devenu gênant, encombrant », écrit-il.
Critiquant l’« immobilisme agité » de Macron, Jouyet juge sévèrement le quinquennat. Il décrit une gouvernance ultra-centralisée et dysfonctionnelle : une haute fonction publique livrée à elle-même ; une décision politique lente et opaque ; des députés LRM inexpérimentés et hors-sol et des ministres, pour la plupart, inconnus.
- Hollande et son « addiction » aux journalistes
S’il affirme entretenir les meilleures relations avec Nicolas Sarkozy, qui l’a nommé secrétaire d’Etat aux affaires européennes en 2007, c’est avec François Hollande, qu’il connaît depuis l’ENA, que les liens restent les plus intenses. De cet « être d’exception », Jouyet connaît la plupart des tentations et des petites faiblesses, comme son « addiction » aux journalistes ou sa propension à remettre au lendemain.
« Je te connais, si tu me dis plus tard, c’est que tu ne le feras jamais », dit-il à son ami qui souhaite différer la mise à l’écart de Valérie Trierweiller, alors que cette dernière vient de le désavouer publiquement avec un Tweet soutenant l’adversaire de Ségolène Royal aux législatives de 2012.
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