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Congrès du PCF : le texte de la direction mis en minorité, une situation inédite pour le parti

Pour leur congrès qui se déroulera fin novembre, les militants ont préféré le « Manifeste pour un Parti communiste du XXIe siècle », porté par André Chassaigne.

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Publié le 06 octobre 2018 à 19h23, modifié le 08 octobre 2018 à 08h58

Temps de Lecture 5 min.

Le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, sur la scène de la Fête de l’Humanité, à La Courneuve, le 16 septembre.

Le « dégagisme » arrive Place du Colonel-Fabien. Les militants communistes devaient se prononcer entre jeudi 4 octobre et samedi 6 octobre sur quatre textes en lice pour leur congrès, qui se déroulera fin novembre, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne).

Et le résultat est inédit : la « base commune », défendue par la direction sortante, autour de Pierre Laurent (secrétaire national depuis 2010) est battue par le « manifeste du Parti communiste du XXIe siècle », porté, entre autres, par André Chassaigne, président du groupe communiste à l’Assemblée nationale, et Fabien Roussel, patron de la puissante fédération du Nord, dont le nom circule pour remplacer M. Laurent à la tête du PCF.

Le texte de la direction recueille 37,99 % des exprimés ; le texte alternatif, totalise, lui, 42,15 %. Ce vote a mobilisé 30 833 communistes quand le PCF compte 49 218 adhérents à jour de leurs cotisations, soit une participation de 62,65 %.

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Pierre Laurent a réagi dans la foulée de la publication des résultats :

« Le vote des communistes n’a pas placé la proposition de base commune du conseil national en tête. J’en prends acte. Je respecte les choix des communistes. Je note que les résultats sont très partagés. Nous avons une nouvelle base commune pour discuter et pas de majorité à ce stade pour avancer. Nous avons donc devant nous un immense débat à poursuivre sur nos choix et un immense défi à relever pour la construction commune,
l’unité et le rassemblement des communistes jusqu’au congrès. Les semaines qui viennent nous appellent toutes et tous au travail commun. J’y mettrai toute mon énergie. »

« Vote utile »

Le « Manifeste », comme le surnomment les communistes, a su résoudre la quadrature du cercle du PCF : être à la fois très critique sur le bilan de la direction − notamment sur l’absence de candidat communiste à la présidentielle de 2017 − et sur Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise (LFI).

La personnalité d’André Chassaigne, roué député du Puy-de-Dôme, extrêmement populaire à la base du PCF, a aussi joué en la faveur d’une contribution qui apparaissait comme le « vote utile » pour des communistes en colère qui ne souhaitent qu’une chose : renforcer leur parti et le remettre sur le devant de la scène politique. L’année 2017 a été très mal vécue, avec de mauvais résultats aux élections législatives (2,72 % des voix au premier tour) que la conservation d’un groupe à l’Assemblée nationale n’arrive pas à faire oublier.

Pourtant, l’attelage pouvait surprendre : MM. Chassaigne et Roussel côtoyaient des militants « durs » proches de l’ancien maire de Vénissieux (Rhône) André Gerin et le « pôle économie » de Frédéric Boccara. Une « alliance de la carpe et du lapin », comme le dénonçaient ses contempteurs, qui a su séduire au-delà de ses bases naturelles. Le « Manifeste » arrive ainsi en tête dans de nombreuses fédérations (Val-de-Marne, Paris, Nord, Pas-de-Calais, entre autres) et est très haut dans plusieurs autres (Côte-d’Or, Moselle).

« C’est historique comme résultat. Et cela s’est passé sereinement, tranquillement, estime Fabien Roussel. On veut tout faire pour éviter que le parti ne s’organise en tendances. Le défi est de rassembler tous les communistes. »

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André Chassaigne, quant à lui, rappelle que « pour la première fois de notre histoire, le texte présenté par le conseil national n’est pas retenu. Cette situation appelle tous les camarades à construire ensemble une orientation politique permettant de rassembler très majoritairement les communistes. » Il ajoute que ce résultat donne « une direction de travail incontournable pour la suite de notre construction collective. »

Pas certain que le choix de samedi plaise à tout le monde en interne. Les principales figures de la ligne « Pour un printemps du communisme » critiquent ainsi « un texte qui prône le retour à des conceptions passéistes qui ont partout échoué » et appellent à une réunion « pour donner au communisme sa figure moderne, ouverte, démocratique, écologique et révolutionnaire ».

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Camouflet pour Pierre Laurent

Une chose est sûre : ces résultats constituent un camouflet pour Pierre Laurent qui brigue un nouveau mandat. Le sénateur de Paris est même minoritaire dans sa propre fédération… Des rumeurs sur sa démission circulent déjà dans les couloirs du siège. Une période de grande incertitude s’ouvre Place du Colonel-Fabien.

Beaucoup de ces questions seront résolues le samedi 13 octobre, lors du prochain conseil national (parlement du parti). « La démission ou non de Pierre Laurent n’est pas la question. Il va y avoir des discussions et c’est à Pierre de créer les conditions du rassemblement », tempère Fabien Roussel, qui ne veut pas se prononcer sur sa possible accession au poste de secrétaire national du PCF.

« En application de nos statuts, le texte “Pour un manifeste du Parti communiste du XXIe siècle” devient donc la base commune de discussion dont tou·te·s les communistes doivent désormais se saisir pour la travailler, l’enrichir de tous les débats et contributions jusqu’au
terme du congrès, avec l’impératif d’une construction collective,
écrit la direction dans un communiqué envoyé samedi soir. Il reviendra au conseil national des 13 et 14 octobre, ainsi qu’aux conseils départementaux, d’analyser et de tirer les enseignements politiques des choix effectués les 4, 5 et 6 octobre par les communistes. »

Les deux autres textes en compétition, sont loin derrière. « Pour un printemps du communisme », emmené par les députés Stéphane Peu (Seine-Saint-Denis) et Elsa Faucillon (Hauts-de-Seine), veut « rassembler les forces antilibérales » pour bâtir un « front commun », principalement avec LFI ; il recueille 11,95 % des voix. Beaucoup de militants le trouvaient trop proche de LFI. Enfin, le texte que d’aucuns qualifient d’« orthodoxe », et porté par les militants de Vive le Parti communiste autour d’Emmanuel Dang Tran, membre du conseil national, réunit quant à lui 7,90 % des suffrages.

Du côté des frères ennemis de La France insoumise, on ne cache pas, en off, la satisfaction de voir Pierre Laurent mordre la poussière. Les relations entre lui et Jean-Luc Mélenchon sont exécrables depuis longtemps. Et certains « insoumis » préfèrent encore un nouveau secrétaire national « hostile » plutôt que de continuer avec Pierre Laurent.

Les « communistes insoumis » devraient, par ailleurs, appeler leurs « camarades » à les rejoindre dans le giron mélenchoniste. Dans une note de blog au lendemain de la Fête de L’Humanité, intitulée « A bientôt camarades ! », M. Mélenchon ne disait pas autre chose : « Il s’agit de sauver les dialogues futurs. Ces dialogues reprendront, un jour ou l’autre, quand cette page [celle de Pierre Laurent à la tête du PCF] sera tournée par les communistes. » Le message ne saurait être plus clair.

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