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Politique

UNR, UDR, RPR, UMP, Les Républicains : qu'est-ce que la "droite"?

ÉDITO - Comment se retrouver aujourd’hui dans une droite incapable depuis des années d’anticiper le changement et de comprendre l’époque ? Il faudrait, pour la reconstruire, expliquer clairement dans les moindres détails ce que veut dire "être de droite".

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Jacques Witt/SIPA

Les critiques affluent, plus insignifiantes et factuelles les unes que les autres, les constats évidents se bousculent, les prévisions et les sondages ne nous apprennent rien et personne n’est capable de me donner une définition de la droite ! Lorsqu’on pose la question à des politiques, ils haussent les épaules méprisants, et de réponse : nenni ! La droite serait donc un mouvement historique qu’il est inutile de définir et dont tout le monde est supposé connaître et les valeurs et les projets et les objectifs. Aucun indice pour comprendre quelles sont aujourd’hui les caractéristiques de cette fameuse droite en faillite.

En revanche on comprend bien ce qu’est la gauche : elle prône le partage des richesses et la justice redistributive. La gauche est généreuse (avec l’argent des autres, qu’elle méprise), elle considère que les finances publiques sont extensibles et que "quand il n’y a plus d’argent il y en a encore", c’est traditionnellement le parti des ouvriers et des employés, les patrons sont sa bête noire. La gauche se revendique le modèle des principes d’égalité dans un élan permanent de générosité mondialisée. Une fois qu’on a dit ça, on sait où l’on va : dans le mur, mais avec fierté et certitudes. Il y a mieux : l’extrême-gauche qui déteste carrément tout ce qui peut ressembler à une élite ou un nanti, le tout en revendiquant une approche révolutionnaire de lutte des classes avec une France terre d’asile, ouverte à tous (quoique…). Quant aux verts, ils ont déteint partout et c’est bon signe. La gauche et les verts flirtent.

Le centre a toujours été au centre, parfaitement illustré par cet aphorisme d’Edgard Faure "si vous n’avez pas d’opinion rejoignez les miennes". Toujours qualifié de mou, il tempère l’ambiance parlementaire en force d’appoint et accueille en son sein des gens de bonne volonté qui ne savent pas très bien quoi penser : ni gauche ni droite ? Et depuis peu "et de gauche et de droite", c’est quand même mieux !

Quant à notre pauvre droite, on n’arrive même plus à la caricaturer en dehors du fait que depuis des dizaines d’années les Français considèrent gaiement qu’ils ont la droite "la plus bête du monde" et ce, même lorsqu’ils sont de droite.

Quelles sont les "valeurs" de droite ?

La droite, était le parti des bourgeois (lorsque le terme n’était pas encore une insulte), des commerçants qui travaillaient dur pour gagner plus, des notables, des professions libérales, de la classe moyenne qui voulait s’élever, du clergé. A droite, on veillait à être "bien élevé" en imposant un certain "savoir-vivre" que la gauche a transformé en "vivre ensemble", supprimant au passage tous les codes sociaux traditionnels et ringards qui maintenaient une certaine colonne vertébrale et poussaient le bourgeois à devenir gentilhomme, le paysan ouvrier, l’ouvrier instituteur... Bref : s’élever dans la société.

Puis, être de droite, c’était privilégier le libéralisme économique, favoriser le commerce en incitant à entreprendre, l’initiative individuelle, la responsabilité, le tout en limitant le poids et les dépenses de l’État. Respecter la tradition, considérer que la France était le pays des droits de l’Homme mais avec des règles dans l’accueil de ressortissants étrangers…

Être à droite, bien que laïque, c’était considérer la France comme la fille aînée de l’Église en estimant que tout cela faisait partie d’une culture bien à nous qu’il convenait de promouvoir et de préserver. Tout cela a explosé en vol.

La droite hésitante a vu monter en puissance une extrême-droite au départ plutôt raciste, refusant l’étranger et très attachée à ses frontières. Sur le plan économique, l’extrême-droite se cherchait. Elle ne se cherche plus : elle a épousé tout ce qu’il y avait de démagogique dans chaque parti et voue le libéralisme aux gémonies. L’extrême-droite n’est plus à droite ! Anti-libérale, dispendieuse des deniers publics, fustigeant élite et bourgeoisie… elle flirte avec les indignés.

Comment se retrouver aujourd’hui dans une droite incapable depuis des années d’anticiper le changement et de comprendre l’époque (d’accord, ce n’est pas si facile). Résultat : la mondialisation n’a pas bonne presse, le libéralisme n’est plus en odeur de sainteté, il faut travailler. Mais on s’est bien gardé de revenir sur les 35H. On a taxé les Français en ayant fermement maintenu l’ISF et surtout sans réformer le Code du Travail en prétendant qu’on allait limiter les aides sociales "excessives". Une droite qui a beau jeu de clamer aujourd’hui qu’il faut baisser les impôts.

Sur le plan sociétal, la droite est entrée en guerre en ordre dispersé contre le mariage pour tous, la PMA, etc. des sujets transversaux qui ne peuvent pas la définir sauf à l’appauvrir gravement. A droite, en principe, on respecte l’autorité, on aime l’armée (mais on a supprimé le service militaire). On est pour l’ordre établi ... sauf lorsque l’ex-chef de ladite droite se promenait en portant un gilet jaune.

Quelles sont donc les valeurs de droite ? Sachant aussi qu’elle s’est construite en opposition à une gauche qui semble tout autant peiner à se remettre en marche (sans mauvais jeu de mots…).

Un parti rétréci qui se voudrait élargi

Face à ce trouble existentiel et à cette vacuité conceptuelle, les querelles d’Hommes n’arrangent rien au contraire… Chercher De Gaulle désespérément est sans espoir (d’ailleurs était-il vraiment de droite ?). Le problème c’est que chacun aime "sa droite" et ne supporte pas celle des autres. Comment donc chacun d’entre nous peut-il se reconnaître dans ce que l’on persiste à appeler la droite ?

Je suis économiquement libérale, troublée mais acceptant l’inéluctable tendance d’évolution des mœurs, pour un état régalien et beaucoup moins omniprésent, je suis farouchement pour la liberté donc la responsabilité individuelle, pour une justice rapide… et juste ! Suis-je de Droite ?

Au point où nous en sommes, il faut déconstruire pour reconstruire, expliquer clairement dans les moindres détails ce que veut dire "être de droite", de cette droite-là qui s’est appelée successivement l’UNR, l’UDR, le RPR, l’UMP, Les Républicains...

La définition et la place de l’Etat pourraient être le socle de reconstruction de la droite : moins d’État mais mieux d’État car c’est de cela que notre pays souffre et c’est ce point qui peut être différenciant et reconstructif. Définir clairement les missions régaliennes, avec les fonctionnaires qui auraient une raison d‘être dans certains corps, comme invitaient à le faire Smith et Ricardo en leur temps. Reconstruire une nouvelle égalité des Français salariés, libres et égaux entre eux face à leur statut, à la retraite et à une fiscalité progressive. Et, en même temps, en conséquence trouver la source des économies de l’État (ne nous mentons pas : personne ne sait où les trouver et le jeu de chaises musicales fiscales nuit gravement à la santé du pays).

Ce ne sont donc pas des promesses qui donneront un sens à ce parti rétréci qui se voudrait élargi, et à qui ? Et pourquoi ? Et sur la base de quel électorat ? Ce n’est certainement pas un nouveau grand débat qui fera jaillir la lumière, toutes les études existent, elles ont été faites, des livres sortent tous les jours traitant fort bien de ces sujets... Il faudrait peut-être aussi songer à travailler à autre chose qu’à compter les points dans les sondages, non ?

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